Un autre point de vue sur l’intelligence artificielle :
https://www.maddyness.com/2018/07/30/intelligence-artificielle-arnaque/
Cette publication souligne les spécificités propres notre espèce, les caractéristiques qui ne peuvent en l’état actuel des choses être simplement imitées ou répliquées. Sans nul doute, la façon que l’on a de nous « vendre » l’intelligence artificielle est trompeuse : elle nous est présentée comme un risque ultime de dépassement de l’homme, un émulateur qui reproduirait, puis remplacerait l’humain devenu obsolète. On est bien loin d’une telle situation. Cependant…
« L’intelligence artificielle repose sur les sciences cognitives. Or, celles-ci ont l’ambition (ce qui ne veut pas dire qu’elles y arrivent) de modéliser la perception, l’intelligence, le raisonnement, les émotions et même la conscience. » nous dit Denis Pages. Y arriver… c’est là toute la question. Peut-on raisonnablement concevoir une modélisation de nos capacités ? Retour vers un terrain connu, celui du 0/1. Pour paraphraser Maitre Yoda : « Fais-le, ou ne le fais pas ». Si l’homme est aussi intelligent que nous le pensons, alors oui, il y arrivera. Mais pour ce faire, il lui faudra construire l’environnement intellectuel propice au développement de ces modèles. Donc, accepter quelques contraintes inhabituelles, parce qu’absentes du champ académique. C’est à dire :
1 – Ego
En premier lieu, il nous faut mettre l’Ego de coté. Cesser d’avoir toujours raison ; cesser de penser que si nous n’y arrivons pas, personne n’y arrivera. C’est possible ou ça ne l’est pas, de façon strictement binaire. Nous ne pouvons pas, ici, être dans la croyance ou la foi, mais dans la preuve matérielle, la démonstration. Pour prouver, il faut faire.
Force est de constater que depuis deux décennies l’intelligence artificielle est restée figée au niveau C1, c’est-à-dire, pour faire court, aux calculs d’exécution et ceci malgré les travaux de John Preskill ( https://arxiv.org/abs/1203.5813 ). Un reportage sur la chaine américaine HBO, documentaire Vice, Saison 6 Episode 18 intitule « Quantum Supremacy » (https://www.hbo.com/vice) et cette courte video https://www.youtube.com/watch?v=90U_SmKyfGI montrent parfaitement les possibilités phénoménales de l’approche quantique. Cela laisse penser que ce blocage peut venir non des limites technologiques, mais de l’incapacité à dépasser nos propres barrages intellectuels. Dit autrement, nous n’arrivons pas à passer l’IA au niveau C2 parce que nous ne posons pas le problème sous une forme permettant sa résolution. Quand nos chercheurs réaliseront-ils que ce qu’ils construisent, découvrent ou inventent n’est que le miroir, l’image projetée de leur propre fonctionnement cérébral ? Il faut alors s’ouvrir à d’autres options, écouter d’autres points de vue, mûrir d’autres réflexions, explorer d’autres pistes de travail. Une sérieuse remise en question des méthodes doit permettre une avancée réelle vers une intelligence de niveau C2. Encore faut-il le vouloir. Nous avons les réponses sous le nez, mais nous ne voulons pas les voir… Question d’Ego.
2 – Porter un autre regard
Remettre les méthodes en question, c’est avant tout décider de s’affranchir de cette culture du résultat qui pollue l’esprit de la recherche : « une R et D oui, mais il faut un retour sur investissement rapide et significatif, de préférence définie par un business plan » nous disent les investisseurs. L’émergence du Deep-Learning et son succès sont bien évidemment une part importante des progrès effectués. Pour autant, peut-on dire que cette démarche nous rapproche d’une intelligence générale de niveau C2 ? Certainement pas, et pour une raison très simple : on ne met pas la charrue avant les bœufs, ça ne fonctionne pas. Apprend-on à l’enfant à se lever, à marcher puis courir et sauter ? Non, il apprend cela de lui-même, par imitation. Ce que fait Boston Dynamics avec son robot Atlas est bien entendu un tour de force ( voir : https://www.lexpress.fr/actualite/sciences/video-ce-robot-humanoide-realise-des-saltos-arriere_1961617.html ). Mais ce robot est programmé en niveau C1 pour le faire. L’intelligence artificielle de niveau C2 sera un traitement de données permettant à la machine de faire elle même l’acquisition de ces aptitudes. À ce stade l’axe de recherche n’est plus la reproduction d’une action, mais la conception d’un centre de calcul (un BIOS spécifique très probablement quantique) dotant la machine d’une faculté d’apprentissage autonome. Nous sommes ici bien loin d’un business plan et d’une rentabilité !
3 – Humilité
Combien de temps faut-il pour former un scientifique depuis la naissance ? 20, 25, 30 ans? Et qui peut prédire que ce nouveau ne va devenir un scientifique d’exception, ou un écrivain de talent, ou un « rien du tout » qui coûte trop cher ? Personne. De même qu’il faut laisser de coté la sacro-sainte culture de résultat, il faut accepter aussi que l’évolution d’une machine de calibre C2 dépend de son environnement éducatif, indépendamment de deux inconnues : le résultat escompté et le temps investi. Comme pour l’homme. Il faut aussi accepter que nous n’ayons aucun contrôle sur le processus de traitement de l’information d’une telle machine (la « pensée »).
En réalité, c’est bien la ce qui fait le plus peur aux autorités concernées par l’IA. On ne peut accepter les décisions que prendrait une intelligence artificielle sans en comprendre le sens. Les demandes pressantes et stressées des agences gouvernementales en attestent. L’article suivant nous éclaire grandement sur le sujet :
https://www.maddyness.com/2018/08/14/ia-deep-learning-trou-noir-intelligence-artificielle
Comment pourrions-nous accueillir les décisions d’une IA sans les comprendre, alors qu’il nous est déjà si difficile d’accepter les singularités humaines ???
L’information est acquise/appropriée ou elle ne l’est pas. Tout ce que nous pouvons faire, c’est constater une évolution, étape par étape, et accompagner cette intelligence artificielle vers ce à quoi elle est destinée. On entre ici de plain-pied dans les sciences de l’éducation.
4 – Intentions
A contrario de ce que nous observons dans le domaine, et de ce que pensent la plupart des acteurs du secteur, nous sommes aujourd’hui parfaitement en mesure de concevoir et de construire un noyau d’apprentissage autonome de niveau C2. Cela n’a pas encore été fait pour les raisons que nous avons évoquées : orgueil, retour sur investissement et pouvoir. Ceci étant, qu’avons-nous à perdre à le faire ? Et qu’avons-nous à y gagner ?
A-t-on demande à Einstein un business plan pour E=mc² ? Lui a-t-on demande à quoi ses recherches pourraient bien servir et combien elles pourraient rapporter ? …
Il faudra bien qu’un jour, les investisseurs acceptent de prendre le risque – limité à leur apport – d’un projet bousculant nos pratiques académiques au profit d’un progrès hors de mesure.
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme » ? Certainement. Tout repose sur une question et une seule : À quelles fins ? La réponse est dans l’intention, comme toujours et pour tout.